L'équipe de la rédaction

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Etudiants EMLV MRH promotion 2015

mercredi 14 janvier 2015

Qu’est-ce que la cause réelle et le motif sérieux ?


Ce n'est que depuis la Loi du 13 Juillet 1973 que la validité du licenciement doit être accompagnée d’un motif qui le justifie.

Le licenciement en France est souvent source de conflit entre l’employeur et le salarié alors même que ce sujet est censé avoir été réglé lors de la signature de la Convention n°159 de l’OIT (Organisation Internationale du Travail) en 1982. L’objet de cette signature est d’imposer la formulation par l’employeur d’un motif de licenciement pour éviter le licenciement arbitraire.

Dans d’autres pays tel que le Danemark par exemple, il existe des dispositifs de prise en charge du salarié licencié, et ce sans condition, ce qui permet de ne pas exiger de motivation du licenciement. Mais cet aspect de sécurisation des parcours professionnels n’est pas actuellement autant développé en France, il est donc obligatoire en France de motiver ses licenciements.

Le motif du licenciement

L’existence d’un motif de licenciement

L'existence d'un motif de licenciement permet au salarié de contester le bien fondé du licenciement. Une lettre de licenciement qui ne comporte pas de motivation rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse et impliquera donc une indemnisation du salarié. Cependant, le motif  doit être fondé et énoncé de façon claire et précise. Si ce n’est pas le cas, la lettre de licenciement n’est pas valide.

La Cour de Cassation dans un arrêt rendu le 20 février 2002  pourvoi 99-40527, rappelle que « ne constitue pas l'énoncé d'un motif précis de licenciement l'inaptitude au poste occupé sans indication de la nature physique ou professionnelle de l'inaptitude invoquée ».

En effet, du fait que le licenciement a un impact considérable sur le salarié, il est essentiel que l’employeur motive son acte.

De plus, il est nécessaire de savoir que le motif de licenciement, une fois qu’il est prononcé et accepté par le salarié, ne peut pas être modifié de façon unilatérale par l’employeur que ce soit en cours ou en fin de préavis. Une fois que la procédure de licenciement est lancée, un deuxième motif survenu après, qu’il soit réel ou non, ne pourra pas supprimer le premier et ne pourra donc pas être suivi.

Une cause réelle de licenciement

Pour que le licenciement soit valide, la motivation de l’employeur doit être réelle c’est à dire : objective, existante et exacte

Le caractère objectif exclut donc les préjugés et les convenances personnelles. La cause réelle peut être, par exemple, une faute, une inaptitude professionnelle ou une réorganisation professionnelle.
Dans un arrêt du 29 novembre 1990, la chambre sociale de la Cour de cassation a énoncé « qu’un licenciement pour une cause inhérente à la personne doit être fondé sur des éléments objectifs ; que la perte de confiance alléguée par l’employeur ne constitue pas en soi un motif de licenciement ».
La cause doit être existante et doit donc se traduire par des éléments extérieurs vérifiables et l’employeur doit se référer à des faits précis pour qu’elle soit jugée valide. Pour le cas d’un vol par exemple, le vol doit être prouvé et faire l’objet d’une plainte au pénal et d’une réclamation devant les prud’hommes.

Enfin, le caractère exacte de la cause signifie que les faits invoqués pour le licenciement doivent être la véritable cause et qu’il n’en existe pas d’autres dissimulés ou inavoués.

Un motif sérieux de licenciement

Selon les débats parlementaires qui ont précédé le vote de la loi de 1973, le motif sérieux est celui « revêtant une certaine gravité qui rend impossible, sans dommages pour l'entreprise, la continuation du contrat de travail ».
C’est le tribunal qui contrôle la constitution du motif en cas de contestation de la cause réelle et sérieuse constituant le motif de licenciement.
L'existence d'un motif de licenciement, ainsi que son caractère réel et son caractère sérieux sont trois éléments qui valent pour tous les types de licenciements.

Par exemple pour un licenciement économique le tribunal appréciera l'objectivité des difficultés économiques de l'entreprise ; le juge doit pouvoir vérifier la véracité de ces difficultés que ce soit au niveau du secteur où au niveau de l’entreprise elle-même.
Dans le cas d'une évolution de l'emploi ou de la réorganisation de l'activité de l'entreprise, le tribunal vérifiera si l'employeur a satisfait à ses obligations de formation, d'adaptation du salarié aux évolutions et de reclassement.
Si ces conditions ne sont pas remplies le licenciement économique sera déclaré sans causes réelle et sérieuse.

Qui doit apporter la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement ?

La preuve repose sur l'employeur ET le salarié.
C'est à l'employeur d’apporter les éléments qui ont fondé sa décision et au salarié d'apporter au Tribunal les éléments contraires.

Les articles L1232-1 , L1233-2 , L1235-1 et 9 (ancien article L 122-14-3 du Code du travail) précisent « le juge ... forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instructions qu'il estime utiles ».

Les articles 9,10 et 11 du Code de procédure civile  rappellent que « chacun est tenu d'apporter son concours à la justice en vue de la vérité ».

Tout licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse a un caractère irrégulier et le préjudice total subi doit être indemnisé. La Cour de Cassation précise que « la seule constatation de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement doit entrainer la condamnation de l'employeur à réparer le préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue » (Cass soc 25.9.91 pourvois 88-45.660 et 88-41.251).

Le salarié ainsi privé d'emploi doit absolument argumenter ses contestations et justifier le montant des indemnités demandées car une procédure Prud'homale n’est pas comme jouer au Jackpot. Les procédures sont souvent longues et entrainent des conflits et des dépenses non négligeables. De plus, les indemnisations sont plafonnées et les sanctions sont très encadrées.

L’encadrement de la procédure de licenciement rend difficile le licenciement pour les entreprises. Cette rigidité est déclarée aujourd’hui comme un frein à l’embauche. C’est pourquoi une forme est de plus en plus usitée par les entreprises : le licenciement se fait par l’employeur et le salarié sous la forme d’un accord conventionnel.
Les ruptures conventionnelles dans les entreprises ont atteint un nouveau sommet en 2014. « Selon les derniers chiffres du ministère du Travail, 25.600 demandes de séparation à l’amiable ont encore été homologuées en novembre, après 32.420 en octobre (un quasi-record mensuel) » – Source Les Echos, Janvier 2015.
De plus, le projet de loi Macron en cours permettra entre autres de faciliter les licenciements, et plus particulièrement les licenciements collectifs.  



Laura FONTAN
EMLV MRH promo 2015